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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 13, trad Mardrus, 1903.djvu/329

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histoire d’ali baba…
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Hussein sa gratitude pour les civilités prodiguées à son fils, et l’invita, en le pressant beaucoup, à entrer se reposer dans sa maison et partager avec lui et son fils le repas du soir. Et il ajouta : « Je sais bien que quoi que je puisse faire, je ne pourrai reconnaître tes bontés pour mon fils. Mais, enfin, nous espérons que tu accepteras le pain et le sel de notre hospitalité ! » Mais hagg Hussein répondit : « Par Allah, ô mon maître, ton hospitalité est certainement une grande hospitalité, mais comment pourrais-je l’accepter alors que j’ai fait, depuis longtemps déjà, le serment de ne jamais toucher aux aliments qui sont assaisonnés de sel, et de ne jamais goûter à ce condiment ? » Et Ali Baba répondit : « Qu’à cela ne tienne, ô hagg béni, je n’aurai qu’un mot à dire à la cuisine, et les mets seront cuits sans sel et sans rien de semblable ! » Et il pressa tellement le marchand qu’il l’obligea à entrer dans la maison. Et aussitôt il courut prévenir Morgane qu’elle eût à ne pas mêler de sel aux aliments, et qu’elle préparât spécialement, ce soir-là, les mets et les farces et les pâtés sans l’aide de cet ordinaire condiment. Et Morgane, extrêmement surprise de l’horreur du nouvel hôte pour le sel, ne sut à quoi attribuer un goût si extraordinaire, et se mit à réfléchir sur l’affaire. Toutefois elle ne manqua pas d’aviser la négresse cuisinière qu’elle eût à se conformer à l’ordre étrange de leur maître Ali Baba.

Lorsque le repas fut prêt, Morgane le servit sur les plateaux, et aida l’esclave Abdallah à les porter dans la salle de réunion. Et, comme de sa nature elle était fort curieuse, elle ne manqua pas de jeter