Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 15, trad Mardrus, 1904.djvu/199

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histoire de baïbars… (le 1er capitaine…)
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Mais la troisième fois, je pris mes précautions. En effet, dès que je fus arrivé au mur en question, où d’ordinaire je me prélassais en m’admirant, je m’étendis par terre et, faisant semblant de dormir, je me mis à ronfler avec autant de bruit qu’une compagnie de chameaux révoltés. Et soudain, ô mon seigneur le sultan, je sentis une main sur mon nombril, qui cherchait je ne sais plus quoi. Et, comme je n’avais rien à perdre dans cette perquisition-là, je laissai la main en question fureter dans la marchandise de haut en bas ; et lorsque je jugeai qu’elle était engagée dans le chemin étroit, au milieu du détroit, je la saisis brusquement, en disant : « Pour où, ô ma sœur ? » Et je me levai sur mon séant, en ouvrant les yeux, et vis que la propriétaire de la gentille main, ornée de bagues de diamant, qui s’était fourvoyée dans cette voie de perdition, était une adolescente féerique, ô mon seigneur le sultan, qui me regardait en riant. Et elle était comme le jasmin. Et je lui dis : « Aisance et amitié, ô ma maîtresse ! Le marchand et sa marchandise sont ta propriété. Dis-moi seulement de quel parterre tu es la rose, de quel bouquet la jacinthe, et de quel jardin le rossignol, ô la plus désirable des jeunes filles ? » Et, parlant ainsi, je me gardais bien de lâcher prise.

Alors, l’adolescente, sans aucune gêne dans le geste ou dans la voix, me fit signe de me lever et me dit : « Ya Si-Moïn, lève-toi et suis-moi, si tu désires savoir qui je suis et quel est mon nom. » Et moi, sans hésiter un instant, tout comme si je la connaissais depuis longtemps, ou comme si j’avais été son frère de lait, je me levai, et, après avoir