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les mille nuits et une nuit

terminer mon affaire d’un seul coup, lorsque mon chien fidèle, ce lévrier couleur d’étourneau, lui sauta à la gorge et le précipita sur le sol en s’y roulant avec lui. Et je profitai aussitôt de cet instant favorable pour prendre le dessus sur mon adversaire et, d’un tour de main, lui ligoter les bras et les jambes. Puis ce fut au tour de Pomme de Pin, que je pris et liai, sans prononcer une parole, tandis que des étincelles sortaient de mes yeux.

« Cela fait, je traînai le nègre hors de la maison et l’attachai à la queue de mon cheval. Puis je pris mon épouse et la plaçai devant moi sur la selle, en travers, comme un paquet. Et, suivi de mon chien lévrier, qui m’avait sauvé la vie, je rentrai à mon palais, où, de ma propre main, je coupai la tête au nègre dont le corps, traîné tout le long de la route, n’était déjà plus qu’une loque pantelante, et donnai sa chair à manger à mon chien. Et je fis saler sa tête, qui est celle précisément que tu vois ici même sur ce plateau, devant Pomme de Pin. Et pour toute punition, à mon épouse, cette éhontée, j’infligeai simplement la vue journalière de la tête coupée de son amant, le nègre. Et voilà pour ces deux-là.

« Mais pour ce qui est du septième nègre, qui avait réussi à prendre la fuite, il ne cessa de courir qu’il ne fût arrivé dans les contrées de Sînn et de Masînn, où règne le roi Tammouz ben Qâmous. Et, par une suite de machinations de nègre, il réussit à aller se cacher sous le lit d’ivoire de la princesse Mohra, fille du roi Tammouz. Et il est présentement son conseiller intime. Et nul dans le palais ne connaît sa présence sous le lit de la princesse.