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les lucarnes… (le poète doreïd…)
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Et Doreïd, qui était dans la tente, du côté des hommes, entendit la réponse méprisante, et en fut cruellement touché. Et, par fierté, il ne laissa rien voir de ses sentiments, et, prenant congé du père de la belle Sôlamide, il partit vers sa tribu. Mais il se vengea de la cruelle par la satire que voici :

Tu déclares, ma chère, que Doreïd est vieux, trop vieux. T’avait-il donc dit, lui, qu’il est né d’hier ?

Tu souhaites avoir pour mari, ô Khansâ, — et certes ! tu as raison un lourdaud à jambes pattues qui sait, la nuit, manœuvrer le fumier des troupeaux.

Oui, que nos divinités te préservent, ma fille, de maris comme moi ! Car moi je suis et fais autre chose.

On sait, en effet, qui je suis, et que si ma main est forte, c’est pour des œuvres autrement sérieuses.

On sait partout que, dans les grandes crises, ni la lenteur ne m’enchaîne, ni la précipitation ne m’emporte, et que j’ai, en tout, prudence et sagesse.

On sait partout que, dans ma tribu, par respect pour moi, nul ne questionne l’hôte que j’abrite, et que mes protégés n’ont jamais de nuits inquiétées.

On sait enfin que même dans les mois affamés de la sécheresse, lorsque les nourrices mêmes oublient leurs nourrissons, mes tentes regorgent de nourritures et mon foyer bouillonne.

Garde-toi donc bien de prendre un mari comme moi, et de faire des enfants de moi.

Toi, ô Khansâ, tu souhaites avoir pour mari — et certes ! tu as raison — un lourdaud à jambes pattues qui sait, la nuit, manœuvrer le fumier des troupeaux.

Car tu déclares, ma chère, que Doreïd est vieux,