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les mille nuits et une nuit

le sable. Et les boucles recroquevillées de ses cheveux tordaient le cœur des spectateurs.

Et elle arriva ainsi au jardin, et vit, dans le bassin d’or pur, sa rose marine épanouie comme jadis, au milieu de l’eau précieuse des roses, enchantement pour les yeux et baume pour l’odorat. Et, après la joie éprouvée de cette rencontre, elle se dit : « Je vais maintenant me cacher sous les arbres, pour voir l’impudent qui a enlevé la rose de mon jardin et la bague de mon doigt. »

Et bientôt arriva près du bassin à la rose l’adolescent dont les yeux, coupes d’ivresse, troublaient les plus sages par les doux feux de leurs regards, dont chacun des cils brillait comme la lame courbe d’un poignard, dont les boucles de musc noir embrouillaient les cœurs comme le nard, dont les joues, belles et fraîches sans fard, surpassaient les joues veloutées des vierges, à tous égards, dont les sourires engageants étaient autant de dards, dont le port était noble à la fois et mignard, dont la commissure gauche était ornée d’une éphélide arrondie avec art, et dont la poitrine, blanche et lisse, était comme une tablette de cristal et abritait un cœur vif et gaillard. Et, à sa vue, Visage de Lys tomba dans une sorte d’étourdissement et perdit presque la raison. Car c’est avec justesse que le poète a dit :

Si, dans une assemblée, l’arc des sourcils tire les flèches des œillades, elles n’atteignent de leur pointe que le cœur digne de l’amour.

Et quand Visage de Lys eut repris ses sens, elle