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histoire du gâteau échevelé…
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… Et l’ami de Mârouf frappa ses mains l’une dans l’autre, et se dit : « Quel peut bien être ce nouveau tour du savetier ? Par Allah ! depuis quand le travail du raccommodage des savates a-t-il pu rendre mon ami possesseur ou conducteur de caravanes ? Mais Allah est le Tout-Puissant ! Et puisse-t-il sauvegarder son honneur et le préserver de la honte publique ! » Et il resta là, attendant, comme les autres, l’arrivée de la caravane.

Et bientôt le cortège fit son entrée dans la ville. Et Mârouf chevauchait en tête, plus brillant mille fois que le roi, et magnifique et triomphant, à faire éclater d’envie la poche à fiel des cochons. Et il était suivi de l’immense caravane encadrée par les beaux mamalik vêtus d’étoffes merveilleuses. Et tout cela était si beau et si prodigieux, que nul ne se souvenait avoir vu ou entendu raconter quelque chose de semblable. Et le marchand Ali vit également Mârouf en cet état extraordinaire, et se dit : « C’est bien ça. Il aura combiné quelque chose avec la princesse, son épouse, pour se moquer du roi. » Et il s’approcha de Mârouf, et réussit à le joindre, malgré tout l’apparat qui l’entourait, et il lui dit, mais de façon à n’être entendu que de lui seul : « Sois le bienvenu, ô cheikh des heureux fripons, et le plus adroit des fourbes ! Qu’est-ce que c’est que tout ça ? Mais, par Allah, tu mérites tout ce qui t’arrive de faveurs et de faste, ô mon ami. Va ! sois content et dilate-toi ! Et qu’Allah augmente tes tours et tes friponneries ! » Et Mârouf se mit à rire des paroles de son ami, et prit rendez-vous avec lui pour le lendemain.