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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 3, trad Mardrus, 1900.djvu/202

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les mille nuits et une nuit

mêmes ne valent que par l’intention qui les inspira ; et chaque homme sera jugé d’après ses intentions, et non d’après ses actions. Sache aussi, ô roi, que la chose la plus admirable en nous, c’est notre cœur. Et comme on demandait, un jour, à un sage : « Quel est le pire des hommes ? » Il répondit : « C’est celui qui laisse le mauvais désir s’emparer de son cœur. Car il perd toute virilité. Et comme le dit le poète, d’ailleurs fort bien :

« La seule richesse est celle recelée dans les poitrines. Mais qu’il est difficile d’en trouver le chemin ! »

« Et notre Prophète (sur lui la paix et la prière !) a dit : « Le véritable sage est celui qui préfère aux choses périssables les immortelles. » On raconte que l’ascète Sabet pleura tellement que ses yeux furent malades ; alors on appela un médecin qui lui dit : « Je ne puis te traiter, à moins que tu ne me promettes une chose. » Il répondit : « Et quelle chose ? » Le médecin dit : « De cesser de pleurer. » Mais l’ascète répondit : « À quoi donc me serviraient mes yeux si je ne pleurais plus ! »

« Mais, ô roi, sache aussi que l’action la plus belle est celle qui est désintéressée. On raconte, en effet, que dans Israël il y avait deux frères ; et l’un de ces frères dit un jour à l’autre : « Quelle est l’action la plus effroyable que tu aies jamais faite ? » Il répondit : « C’est celle-ci : comme je passais un jour près d’un poulailler, je tendis le bras et je saisis une poule, et, l’ayant étranglée, je la rejetai dans le poulailler. C’est là la plus effroyable chose de ma vie. Mais toi,