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histoire du roi omar al-némân…
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bine et fut dans un chagrin considérable, surtout en pensant que le nouveau venu pourrait lui disputer la succession au trône ; et il résolut en lui-même de supprimer sans faute l’enfant de la concubine, au cas où ce serait un enfant mâle. Voilà pour Scharkân !

Mais, pour ce qui est de la concubine, c’était une jeune esclave grecque qui s’appelait Safîa[1]. Elle avait été envoyée en présent au roi Omar par le roi des Grecs de Kaïssaria[2], avec une quantité de choses somptueuses. De toutes les jeunes esclaves du palais, c’était elle qui était de beaucoup la plus belle certainement et la plus jolie de visage et la plus fine de taille et la plus forte de cuisses et d’épaules. Avec cela elle était douée d’une intelligence fort rare et de qualités peu communes ; et elle savait, durant les nuits que le roi Omar passait maintenant avec elle, lui dire des paroles fort douces qui lui charmaient les sens et le flattaient beaucoup, des paroles mousseuses et pénétrantes, fort douces et pénétrantes. Et elle ne cessa de la sorte jusqu’à ce que fût venu le terme de sa grossesse. Elle s’assit alors sur la chaise de l’accouchement, en proie aux douleurs de l’enfantement, et se mit à implorer Allah dévotement, et Allah l’écouta sans aucun doute et à l’instant[3].

De son côté, le roi Omar chargea un eunuque de venir lui annoncer sans retard la naissance de l’enfant et son sexe ; et Scharkân, de son côté, ne manqua pas de charger un autre eunuque de ce soin. À peine Safîa eut-elle accouché, que les sages-femmes reçurent l’enfant

  1. Safia : Limpide et pure comme l’eau.
  2. Kaïssaria : Césarée de Cappadoce, peut-être.
  3. Ces allitérations et assonances : par souci du texte arabe.