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les mille nuits et une nuit

voyant ces yeux qui pleuraient, fut encore plus attendri et endolori, et pleura aussi beaucoup et récita ces deux strophes :

« Je lui fis mes adieux, et ma main droite séchait mes larmes et ma main gauche entourait son cou.

Elle me dit, peureuse : « Oh ! ne crains-tu pas de me compromettre aux yeux des femmes de ma tribu ? »

Je lui dis : « Que non ! car le jour des adieux n’est-il pas par lui-même la trahison des amoureux ? »

Et Scharkân quitta Abriza et sortit du monastère et remonta sur son coursier que deux jeunes filles tenaient par la bride, et s’en alla. Il passa le pont aux chaînes d’acier et s’engagea parmi les arbres de la forêt et finit par arriver à la clairière située au milieu de la forêt. Et à peine y était-il parvenu qu’il vit trois cavaliers en face de lui, arrêtés brusquement dans leur galop. Et il tira sa flamboyante épée et s’en couvrit, prêt au choc. Mais soudain il les reconnut et ils le reconnurent, car les trois cavaliers étaient le vizir Dandân et les deux principaux émirs de sa suite. Alors les trois cavaliers mirent vivement pied à terre et vinrent respectueusement souhaiter la paix au prince Scharkân, et lui exprimèrent toute l’angoisse où son absence avait jeté l’armée. Et Scharkân leur raconta l’histoire dans tous ses détails, depuis le commencement jusqu’à la fin, et la prochaine arrivée de la reine Abriza et la trahison projetée par les envoyés d’Aphridonios ; et il leur dit : « Il est probable qu’ils ont dû profiter de votre absence à vous trois pour s’échapper et aller prévenir