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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 6, trad Mardrus, 1901.djvu/145

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histoire de sindbad le marin (4e voyage)
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nous finîmes, aidés par le vent et le courant, par être jetés comme des épaves, morts déjà à moitié de froid et d’épouvante, sur le rivage d’une île.

Nous restâmes toute une nuit anéantis, sans mouvement, sur le rivage de cette île. Mais le lendemain nous pûmes nous lever et nous avancer à l’intérieur, où nous aperçûmes une habitation vers laquelle nous nous dirigeâmes.

À notre arrivée, nous vîmes sortir de la porte de cette habitation une troupe de gens complètement nus et noirs qui, sans nous dire un seul mot, s’emparèrent de nous et nous firent pénétrer dans une grande salle où, sur un haut siège, était assis un roi.

Le roi nous ordonna de nous asseoir, et nous nous assîmes. Alors devant nous on apporta des plateaux remplis de mets que de notre vie entière nous n’avions vus ailleurs. Leur vue n’excita guère mon appétit, contrairement à mes compagnons qui en mangèrent gloutonnement pour apaiser la faim qui les tenait depuis notre naufrage. Quant à moi, mon abstention fut la cause qui devait me conserver la vie jusqu’aujourd’hui.

En effet, dès les premières bouchées, une fringale énorme s’empara de mes compagnons, qui se mirent à avaler pendant des heures et des heures tout ce qu’on leur présentait, avec des gestes de fous et des reniflements extraordinaires.

Pendant qu’ils étaient en cet état, les hommes nus apportèrent un vase rempli d’une sorte de pommade dont ils leur enduisirent tout le corps, et dont l’effet sur leur ventre fut extraordinaire. En