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les mille nuits et une nuit

tous ceux qui, à l’avenir, t’apporteraient un présent, régleraient leurs espoirs sur ce prix-là, comme point de départ ; et tu ne pourrais plus faire face à leurs prétentions ! » Le roi Khosrou répondit : « Ce serait pourtant un opprobre pour un roi de reprendre ce qu’il a donné. Oublions donc ce qui est passé ! » Mais Schirîn répondit : « Non ! il n’est pas possible de laisser la chose courir de la sorte ! Il y a moyen de reprendre la somme sans que le pêcheur ni personne puisse trouver à redire. On n’a pour cela qu’à faire revenir le pêcheur et à lui demander : « Le poisson que tu m’as apporté est-il mâle ou femelle ? » S’il te répond que c’est un mâle rends-lui le poisson en disant : « C’est une femelle que je veux ! » et s’il te dit que c’est une femelle, rends-le tout de même en disant : « C’est un mâle que je veux ! »

Le roi Khosrou, qui aimait d’un amour extrême la belle Schirîn, ne voulut pas la contrarier, et se hâta de faire, mais avec regret, ce qu’elle lui conseillait. Seulement, le pêcheur était un homme doué de finesse d’esprit et d’à-propos, et lorsque Khosrou, l’ayant fait revenir, lui eut demandé : « Le poisson est-il mâle ou femelle ? » il embrassa la terre et répondit : « Ce poisson-là, ô roi, est hermaphrodite ! »

À ces paroles, Khosrou se dilata d’aise et se mit à rire, puis ordonna à son intendant de donner au pêcheur huit mille drachmes au lieu de quatre mille. Le pêcheur s’en alla avec l’intendant qui lui compta les huit mille drachmes ; et il les mit dans le sac qui lui avait servi à apporter le poisson, et sortit.

Lorsqu’il fut dans la cour du palais, il laissa, par