Aller au contenu

Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 7, trad Mardrus, 1901.djvu/55

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
histoire d’ibn al-mansour
47

jardin au palais. Cela n’est pas suffisant pour ton instruction. Va donc, maintenant que tu en as tout le loisir, essayer de voir quelque chose d’intéressant par les rues de Bassra. D’ailleurs il n’y a rien de préférable à la marche pour aider à la digestion ; et ta digestion est bien lourde ; et tu engraisses et tu te gonfles comme une outre ! » Alors moi j’obéis à la voix de mon âme offusquée de mon embonpoint, et sur l’heure je me levai, je mis mes plus beaux habits, et sortis du palais pour errer un peu, de ci, de là, à l’aventure.

Or tu sais bien, ô émir des Croyants, qu’il y a dans Bassra soixante-dix rues, et que chaque rue est longue de soixante-dix parasanges en mesure de l’Irak. Aussi moi, au bout d’un certain temps, je me vis soudain perdu au milieu de tant de rues, et, dans ma perplexité, je me mis à marcher plus vite, n’osant pas demander ma route de peur d’être tourné en ridicule. Cela fit que je me mis à transpirer beaucoup ; et j’eus également bien soif ; et je crus que le soleil terrible allait indubitablement liquéfier la graisse sensible de ma peau.

Je me hâtai alors de prendre la première ruelle de traverse pour chercher à me mettre un peu à l’ombre, et j’arrivai de la sorte dans un cul-de-sac où se trouvait l’entrée d’une grande maison de fort belle apparence. Cette entrée était à moitié cachée par une portière en soie rouge, et donnait sur un grand jardin qui précédait la maison. De chaque côté, il y avait un banc de marbre ombragé par le feuillage d’une vigne grimpante, et qui m’invita à m’y asseoir pour prendre haleine.