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les mille nuits et une nuit

écrits. Il remplit de la sorte, d’une très fine écriture, cinq feuilles qui contenaient la quintessence de tout son savoir et des cinq mille manuscrits qu’il possédait. Puis il les relut, réfléchit, et trouva que ces cinq feuilles elles-mêmes contenaient des choses qui pouvaient être encore plus quintessenciées. Alors il consacra encore une année à réfléchir, et finit par résumer les cinq feuilles en une seule qui était elle-même cinq fois plus petite que les premières. Et lorsqu’il eut fini ce travail, il sentit que sa fin était proche.

Alors le vieux savant, de peur que ses livres et ses manuscrits ne devinssent la propriété d’autrui, les jeta dans la mer jusqu’au dernier, et ne conserva que la petite feuille de papier en question. Il appela son épouse enceinte et lui dit : « Mon temps est fini, ô femme, et il ne m’est pas donné d’élever moi-même l’enfant que le ciel nous accorde et que je ne verrai pas. Mais je lui laisse comme héritage cette petite feuille de papier que tu lui donneras le jour seulement où il te demandera sa part dans les biens de son père. Et lui, s’il arrive à la déchiffrer et à en comprendre la portée, il sera l’homme le plus sage de son siècle. Je désire qu’il soit appelé Hassib ! » Et, ayant dit ces paroles, le sage Danial expira dans la paix d’Allah.

On lui fit des funérailles auxquelles assistèrent tous ses disciples et tous les habitants de la ville. Et tous le pleurèrent beaucoup et prirent le deuil de sa mort.

Or, quelques jours après, l’épouse de Danial mit au monde un enfant mâle bien fait qui, selon la recommandation du défunt, fut appelé Hassib. Elle fit en