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histoire magique du cheval d’ébène
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l’ascension, et aussitôt le cheval se remplit de vent quant à son ventre, se mouvementa et s’agita en bondissant comme les vagues de la mer, puis prit avec eux son essor en s’élevant comme un oiseau dans les airs, et, en un instant, laissa loin derrière lui la ville et les jardins.

À cette vue, la jeune fille, bien surprise, s’écria : « Ho, toi ! où vas-tu de la sorte sans exécuter les ordres de ton maître ? » Il répondit : « Mon maître ! Et qui est mon maître ? » Elle dit : « Le fils du roi ! » Il demanda : « Quel roi ? » Elle dit : « Je ne sais pas ! » À ces paroles, le magicien éclata de rire et dit : « Si c’est du jeune Kamaralakmar que tu veux parler, qu’Allah le confonde ! c’est une espèce de stupide coquin, un pauvre garçon, en somme ! » Elle s’écria : « Malheur à toi, ô barbe de malheur ! Comment oses-tu parler de la sorte de ton maître, et lui désobéir ! » Le magicien répondit : « Je te répète que ce jouvenceau-là n’est point mon maître ! Sais-tu, toi, qui je suis ? » La princesse dit : « Je ne sais rien de toi si ce n’est ce que tu m’en as dit toi-même ! » Il sourit et dit : « Tout ce que je t’ai dit n’était qu’un stratagème tramé par moi contre toi et le fils du roi ! Sache, en effet, que ce vaurien avait réussi à me voler ce cheval, l’œuvre de mes mains, sur lequel tu te trouves maintenant ; et il m’a ainsi longtemps brûlé le cœur et fait pleurer sa perte. Mais me voici redevenu le maître de mon bien, et à mon tour je brûle le cœur de ce voleur et je fais pleurer ses yeux sur ta perte ! Raffermis donc ton âme de courage et sèche et rafraîchis tes yeux, car moi je serai pour toi d’un bien plus grand profit que