Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 8, trad Mardrus, 1901.djvu/239

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dalila-la-rouée… (ali vif-argent…)
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roueries, en malices et en tours de toutes sortes. Il est vrai que maintenant il s’est assagi et, ayant renoncé à son ancien métier de larron et de chef de bande, a ouvert boutique et s’est fait marchand de poisson frit. Mais cela ne l’a pas, tout de même, empêché de garder quelque chose de ses talents passés. Ainsi pour te donner, ya Ali, une idée de la finesse de ce chenapan, je ne te raconterai que le dernier expédient qu’il a trouvé et qu’il emploie pour attirer les clients à sa boutique et se défaire de son poisson. Il a suspendu au milieu de l’entrée de sa boutique, avec un cordon de soie, une bourse qui contient mille dinars, toute sa fortune, et il a fait annoncer dans tout le souk par le crieur public : « Ô vous tous, larrons de l’Irak, fripons de Baghdad, brigands du désert, voleurs d’Égypte, apprenez la nouvelle ! Et vous tous, genn et éfrits de l’air et de dessous terre, apprenez la nouvelle ! Quiconque pourra enlever la bourse suspendue dans la boutique de Zoraïk, marchand de poisson frit, en sera le légitime possesseur ! » Or tu comprends facilement si, avec une annonce pareille, les clients se sont empressés d’accourir et d’essayer d’enlever la bourse, en achetant du poisson ; mais les plus habiles d’entre eux n’y ont guère réussi ; car le roué Zoraïk a installé tout un mécanisme qui correspond, au moyen d’une ficelle, avec la bourse suspendue. Or celle-ci, à peine touchée, quelque légèrement que ce soit, met en branle le mécanisme composé d’un système étonnant de clochettes et de grelots qui font un tel vacarme que Zoraïk, au cas où il est au fond de sa boutique ou occupé avec un client, entend le bruit