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les mille nuits et une nuit

l’aspect d’êtres humains, ils fassent la haie dans la grande cour du palais sur le passage du roi. Et le roi, qui verra leur nombre et leur qualité, en sera terrifié et épouvanté, et son cœur en frémira. Et alors il saura que ma puissance dépasse la sienne ; et il en fera son profit ! » Et, à l’instant, l’éfrit Tonnerre convoqua et fit paraître deux cents éfrits sous l’aspect de gardes armés et revêtus de riches armures, et bien terribles et de taille énorme. Et le roi entra dans la cour et passa entre les deux rangs de soldats ; et en voyant leur aspect terrible, il sentit frémir son cœur. Puis il monta au palais et entra dans la salle où se trouvait Jouder ; et il le trouva assis avec une allure et un air que vraiment n’avaient jamais eus ni roi ni sultan ! Et il lui jeta le salam et s’inclina entre ses mains et formula ses souhaits, sans que Jouder se levât en son honneur ou lui montrât des égards ou l’invitât à s’asseoir, au contraire ! Il le laissa debout, pour ainsi se faire valoir, si bien que le roi perdit toute contenance et ne sut plus s’il devait rester là ou s’en aller. Et Jouder, au bout d’un certain temps, lui dit enfin : « En vérité, est-ce là une façon de se conduire que d’opprimer, comme tu l’as fait, les gens sans défense et que de les dépouiller de leurs biens ? » Il répondit : « Ô mon seigneur, daigne m’excuser ! C’est par la convoitise et l’ambition que j’ai été poussé à agir de la sorte, et aussi parce que c’était ma destinée ! Et d’ailleurs sans la faute il n’y aurait point de pardon ! » Et il continua à s’excuser de tout ce qu’il avait pu commettre par le passé, et à le supplier pour l’indulgence et le pardon ; et même, entre autres excuses, il lui récita ces vers :