Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 8, trad Mardrus, 1901.djvu/51

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« Ô pêcheur ! si tu consens à me consoler en me le faisant retrouver, quel ne sera pas mon bonheur ! et comme je t’en saurai gré !

« Je te donnerai des pierreries et des joyaux, et des perles fraîchement cueillies et toutes les choses précieuses.

« Puisse mon ami satisfaire un jour mes désirs ! car mon cœur fond dans l’attente et s’émiette ! »

Lorsque le pêcheur eut entendu ces paroles, il pleura, gémit et se lamenta en se souvenant lui aussi des jours de sa jeunesse, quand il était vaincu par l’amour, tourmenté par la passion, torturé par les transes et les désirs, brûlé par les feux des transports amoureux. Et il se mit à réciter ces vers :

« Quelle excuse péremptoire de l’intensité de mon ardeur ! Membres décharnés, larmes répandues, yeux cassés par les veilles, cœur battu comme un briquet étincelant !

« La calamité de l’amour m’a atteint dès la jeunesse, et j’en ai goûté toutes les décevantes douceurs.

« Maintenant je veux bien me vendre pour faire retrouver ton ami absent, au risque d’y perdre l’âme !

« J’espère pourtant que cette vente sera pour moi lucrative, car la coutume des amoureux est de ne jamais marchander le prix de leur ami ! »

Une fois que le pêcheur eut fini de réciter ces vers, il s’approcha avec sa barque du rivage et dit à l’adolescente : « Descends dans la barque, car me voici prêt à te conduire n’importe où tu désireras ! » Alors