Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 8, trad Mardrus, 1901.djvu/59

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
rose-dans-le-calice et délice-du-monde
51

« Sache donc que dans les anciens temps une gennia, de la race des genn chinois, est descendue sur cette montagne. Or il advint qu’un jour, dans ses excursions terrestres, elle fit la rencontre d’un homme et elle l’aima d’un amour éperdu. Mais, craignant pour elle-même la colère des genn de sa race, si l’aventure venait à être connue, elle se mit, quand elle ne put plus réprimer l’ardeur de ses désirs, à la recherche de quelque endroit solitaire où cacher son amant aux yeux des genn, ses parents, et finit par trouver cette montagne inconnue aux hommes et aux genn, puisqu’elle n’était sur aucune route parcourue par ceux-ci ou ceux-là. Elle enleva alors son amant et le transporta à travers les airs pour le déposer dans cette île, où elle demeura avec lui. Et elle ne s’absentait de là que pour aller de temps en temps faire acte de présence au milieu de ses parents, et se hâtait de revenir aussitôt auprès de son bien-aimé, en cachette. Cela fit qu’au bout d’un certain temps de cette vie-là elle devint enceinte de lui à plusieurs reprises, et mit au monde dans cette montagne des enfants nombreux. Or, chaque fois que les marchands qui voyageaient de ce côté-là sur leur navire, passaient près de cette montagne, ils entendaient les cris des enfants qui ressemblaient beaucoup aux cris plaintifs d’une mère se lamentant, et ils se disaient : « Il doit y avoir sur cette montagne une pauvre mère qui a perdu ses enfants ! » Et tel est le motif de cette appellation. »

En entendant ces paroles, le vizir du roi Derbas fut extrêmement étonné.

Mais déjà ils étaient descendus à terre, et étaient