Page:Le massacre au Fort George - La mémoire de Montcalm vengée - 1864.djvu/21

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 20 —

Je n’avais quitté que quelques moments cette scène lamentable, lorsqu’un joli petit garçon d’à peu près douze ans, qui jusqu’alors avait réussi à se sauver, s’approcha de moi et me pria de lui permettre de se tenir avec moi, afin de pouvoir échapper aux barbares. Je lui dis que je ferais tout en mon pouvoir pour l’aider et je lui enjoignis de me prendre par la main ; mais au bout de quelques instants, on l’arracha à mes côtés et par ses cris, je jugeai qu’il expira promptement. Je ne pus m’empêcher d’oublier pendant un instant mes propres malheurs, pour déplorer le sort d’une si jeune victime, mais comment aurais-je pu l’empêcher ?

J’arrivai une fois de plus au milieu d’amis, mais nous ne pouvions nous aider les uns les autres ; comme c’était là le détachement qui s’était avancé le plus loin du fort, je crus qu’une chance (une seule peut-être) me restait de pénétrer à travers les rangs extérieurs des sauvages et d’atteindre un bois, que je voyais dans le lointain. La manière miraculeuse dont j’avais échappé au trépas me laissait encore quelqu’espoir.

Mes anticipations ne furent pas vaines, et les efforts que je fis ne furent pas sans résultat. Il suffit de dire que j’atteignis le bois : mais en y entrant, je me trouvai tellement hors d’haleine, que je me jetai dans un buisson et y demeurai presque sans vie. Enfin le souffle me revint, et mon ancien effroi me saisit comme de plus bel, à la vue de plusieurs sauvages