Page:Le massacre au Fort George - La mémoire de Montcalm vengée - 1864.djvu/31

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et de religion, tous propres à inviter les jeunes gens à marcher avec joie au combat : voilà le fond de ces sortes de discours, qui, pour l’ordinaire, ne se ressentent point de la barbarie sauvage ; j’en ai entendu plus d’une fois qui n’auraient pas été désavoués par nos plus beaux esprits de France. Une éloquence puisée toute dans la nature n’y fesait pas regretter le secours de l’art.

La harangue finie, on procède à la nomination des capitaines qui doivent commander dans le parti. Dès que quelqu’un est nommé, il se lève de sa place et vient se saisir de la tête d’un des animaux qui doivent faire le fond du festin. Il l’élève assez haut pour être aperçu de toute l’assemblée, en criant ; Voilà la tête de l’ennemi. Des cris de joie et d’applaudissements s’élèvent alors de toutes parts et annoncent la satisfaction de l’assemblée. Le capitaine, toujours la tête de l’animal en main, parcourt tous les rangs, en chantant sa chanson de guerre, dans laquelle il s’épuise en fanfaronade, en défis insultans pour l’ennemi, et en éloges outrés qu’il se prodigue. À les entendre se prôner dans ces momens d’un enthousiasme militaire, ce sont tous des Héros à tout emporter, à tout écraser, à tout vaincre. À mesure qu’il passe en revue devant les sauvages, ceux-ci répondent à ces chants par des cris sourds, entrecoupés et tirés du fond de l’estomac, et accompagnés de mouvemens de corps si plaisans, qu’il faut y être fait pour les voir de sang-froid. Dans le cours de la