Page:Le massacre au Fort George - La mémoire de Montcalm vengée - 1864.djvu/68

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dont le sort était aussi à plaindre. Chaque jour l’activité et la bravoure sauvage multipliait les prisonniers, c’est-à-dire, les misérables. Il n’était pas possible à l’ennemi de faire un pas hors de la place, sans s’exposer, ou à la captivité, ou à la mort, tant les sauvages étaient alertes. Jugez-en par ce seul récit. Une femme anglaise s’avisa d’aller ramasser des herbages dans les jardins potagers presque contigus aux fossés de la place. Sa hardiesse lui coûta cher : un sauvage, caché dans un quarré de choux, l’aperçut, et avec son fusil, la coucha sur le carreau. Il n’y eut jamais moyen que les ennemis vinssent enlever son cadavre, le vainqueur toujours caché fit sentinelle tout le jour, et lui enleva la chevelure.

Cependant toutes les nations sauvages s’ennuyaient fort du silence de nos gros fusils ; c’est ainsi qu’ils désignent nos canons : il leur tardait de ne plus faire seuls les frais de la guerre, de sorte que pour les contenter, il fallut hâter la tranchée, et y dresser notre première batterie. La première fois qu’elle joua, ce furent des cris de joie, dont toutes les montagnes retentirent avec fracas. Il ne fut pas nécessaire, durant tout le cours du siège, de se donner de grands mouvemens pour être instruits du succès de notre artillerie. Les cris des sauvages en portaient à tous les momens la nouvelle dans tous les quartiers. Je pensai sérieusement à quitter le mien ; l’inaction où j’y étais condamné, à raison de l’éloignement