Page:Le massacre au Fort George - La mémoire de Montcalm vengée - 1864.djvu/81

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du sauvage, entre les bras de qui j’aperçus l’innocente victime qui baisait tendrement les mains de son ravisseur, et qui jouait avec quelques colliers de porcelaine qui le paraient. Ce coup-d’œil donna une nouvelle ardeur à mon zèle. Je commençai par flatter le Huron par tous les éloges que la vérité pouvait me permettre de donner à la valeur de sa nation. Il me comprit du premier coup ; Tiens, me dit-il fort civilement, vois-tu cet enfant ? je ne l’ai point volé ; je l’ai trouvé délaissé dans une haie ; tu le veux, mais tu ne l’auras pas. J’eus beau lui remontrer l’inutilité de son prisonnier, sa mort assurée par le défaut de nourriture convenable à la délicatesse de son âge ; il me produisit du suif pour le régaler ; ajoutant qu’après tout il trouverait en cas de mort, un coin de terre pour l’ensevelir, et qu’il me serait libre alors de lui donner ma bénédiction. Je répliquai à son discours par l’offre que je lui fis de lui remettre une assez grosse somme d’argent, s’il voulait se désaisir de son petit captif ; il persista dans la négative ; il se relâcha dans la suite jusqu’à exiger en échange un autre anglais. S’il n’eût rien diminué de ses prétentions, c’était fait de la vie de l’enfant. Je croyais déjà son arrêt de mort porté, lorsque je m’aperçus qu’il tenait conseil en Huron avec ses compagnons : car jusqu’alors la conversation s’était tenue en français qu’il entendait. Ce pourparler fit luire à mes yeux un rayon d’espérance ; elle ne fut pas trompée. Le résultat fut que l’enfant était à moi si je