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faisant ; on sait que les Romains avaient placé l’image du sanglier, un des insignes de la Xe légion, sur une des portes d’Aelia, fermée aux Juifs après la guerre d’Hadrien[1].

Les Romains confus et soumis, apportant au Messie leurs dons, en seront pour leur courte honte, repoussés et humiliés. Naturellement les Israélites seront associés à la gloire de leur roi, et goûteront les délices de l’oisiveté. Éliézer, fils de José le Galiléen, a eu la singulière idée de comparer ce bonheur à celui de prêtres-rois qui n’auraient rien à faire. C’était peu qu’ils fussent des princes, car cela pourrait s’entendre de princes commerçants comme ceux de Tyr (Is. xxiii, 8) ; ils devaient être rois. Mais un roi est exposé à la nécessité de faire la guerre. Ils seraient donc aussi prêtres, et, comme on se rappelait certains prêtres errants, assez mal en point, ils seraient des prêtres princes, des prêtres oisifs[2]. Voilà ce qu’on avait fait du beau texte de l’Exode (xix, 6), que l’Apocalypse de saint Jean sut entendre dans un sens tout autre et vraiment spirituel[3].

Ainsi rien ne paraissait trop extraordinaire pour les temps messianiques. Dans cette surenchère de bonheur inouï, on n’est pas peu surpris d’entendre une voix discordante qui a cependant trouvé beaucoup d’écho dans le Talmud de Babylone. C’est celle d’un amora de Babylone, R. Samuel. Il affirmait qu’il n’y aurait « entre ce monde et les temps messianiques d’autre différence que l’assujettissement des royaumes [à Israël], car il est dit : il ne cessera pas d’y avoir des pauvres dans le pays » (Dt. xv, 11)[4].

Et l’on regardait comme une confirmation de cet avis la sentence de R. Khiya, déjà citée, qui distinguait nettement le temps messianique et le monde futur. Si le temps messianique n’était qu’un épisode de l’histoire humaine, les conditions de la vie et de la nature ne devaient donc point être changées. Seulement au lieu d’implorer un changement religieux, R. Samuel n’attendait qu’une péripétie poli-

  1. Ch rai). d’Eusèbe » traduite par S, Jérome r Ae/ia ab Aelio Hadriano condi£a, et. ùi (renie ejus portât, qua BeUilr&n egrediniur, sus sculptus in marmore, stgnificans Komanae polestati subjacere Judaeos (/\ L., L XXVII, 619*622). M. Klausner (L L,p. W5 s.) pense que les Romains ont placé cet emblème pour humilier les Juifsen réalité le sanglier est simplement un des insignes de la legio X* fretensis ; et même « il se trouve comme emblème sacré des étendards de la plus ancienne armée romaine » (Micrionr, I960, p. 103).
  2. KLAUSNEU, L L ; p. H4, daprès MtkiUa, éd. Friedman nt p. 63“. On comparait ces prêtres actifs aux fils de David qui étaient princes, et, dans Topinion des rabbins, sans véritables fonctions sacerdotales (il vin, 18).
  3. Apoc. î, 6.
  4. Chabbath, « 3: ntean ITO’S yç-jyn pn bxlDSJ ION7 bxTOÜI NJ’bsi .y7XII p’IX Hrr >6 " nbz n’I’jbc Tzr/’f NSN