Page:Le messianisme chez les Juifs.pdf/296

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La femme superstitieuse de Juvénal prête l’oreille aux prêtres et aux charlatans de toutes les religions[1] :

Voici qu’arrive quittant son panier et son foin, une Juive qui toute tremblante lui mendie mystérieusement à l’oreille : c’est l’interprète des lois de Solyme, la grande prêtresse de l’arbre, la fidèle messagère des décrets du ciel. Elle aussi, on lui remplit la main, mais moins généreusement ; les Juifs vendent au rabais autant de songes[2] que vous voulez.

Le dernier trait est assez dur. Le poète nomme des songes ou des chansons ce qui n’est peut-être que le pur enseignement de la Loi. Il est assez remarquable qu’il n’accuse pas sa juive de sortilèges ridicules.

Dans quelle mesure les Juifs se prêtaient-ils à ce mélange ? Une certaine tolérance était suggérée par l’intérêt même de la propagande. Qui avait seulement commencé avait chance d’aller jusqu’au bout. Et comme toujours en pareil cas, on comptait surtout sur les effets de l’éducation. L’enfant nourri dans le respect du sabbat n’éprouverait plus aucune répugnance pour la circoncision. C’est un peu l’histoire de tous les apostolats que Juvénal a décrite dans les vers célèbres[3] :

Celui-ci a eu, par hasard, un père observateur du sabbat ; il n’adorera que les nuages et la divinité du ciel ; il ne fera aucune différence entre la chair humaine et celle du porc, dont s’est abstenu son père ; bientôt même il se fait circoncire. Élevé dans le mépris des lois romaines, il n’apprend, n’observe, ne révère que la loi judaïque, tout ce que Moïse a transmis à ses adeptes dans un volume mystérieux : ne pas montrer la route au voyageur qui ne pratique point les mêmes cérémonies ; n’indiquer une fontaine qu’au seul circoncis. Et tout cela parce que son père passa dans l’inaction chaque septième jour, sans prendre aucune part aux devoirs de la vie.

Le nouveau circoncis fait du zèle ; il est plus juif que les Juifs, et c’est sans doute ainsi qu’il faut expliquer la parole de Jésus : « quand

  1. Satire VI, 542 s s. : Copltino foenoqtte relielo, Arcanam ludaea tremens mendient in aurem, Interpres legum Solymarum et magna sacerdos Arborts ac summi ftda internuntia coeli. Implel et ilia manum, sed parcîus ; acre minute Qualiaeumqtie voles ludaei somnia vendunt.
  2. Dans la traduction Reinach « visions », ce qui aggraverait te cas des juifs, accusés de vendre des révélations privées fausses-
  3. Satire XIV, 96 ss. : Quidam sortiti metuenlem sabbata patreni Nil praeter nubes et coeli numen adorant, Nec distare putant httmana carne suillam Qua pater abstinuit ; mox et praepulia ponunt. Ilomanas aulem soliti contemnere leges, ludaicum ediscunt et servant ac metuunt ius Tradidit arcano quodeumque •voltimine floses ? Non monstrare vias eadem nisi. sacra colentl ; Quaesitum ad foncent solos dedueere verpos. Sed pater in causa, cui septima quaeque fuit lux Ignava cl partent vltae non attigit