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monarchie et des pouvoirs semblables, d’être rattachés à la Syrie et régis par ses gouverneurs » [1].

Tenir ce langage, ce n’était pas renoncer aux espérances messianiques. Cela, c’était l’œuvre de Dieu, qu’il saurait bien réaliser en temps voulu. La première chose à faire était d’écarter la dynastie hérodienne. Ceux qui se soulevèrent par petites bandes furent amenés à combattre les Romains, mais il est si vrai que leur autorité n’était point directement en cause, au moins d’une façon générale, qu’après la répression de Varus, Auguste n’envoya au supplice que les parents d’Hérode, pour n’avoir pas rougi de faire la guerre à leur propre maison[2]. Néanmoins, c’est à cette époque que Josèphe fait remonter l’origine du parti de l’indépendance absolue, ce parti qu’on nomma ensuite les Sicaires, et qu’il qualifie assez étrangement de « quatrième philosophie » des Juifs. Le fondateur de la secte est Judas le Galiléen, qui souleva les Juifs à l’occasion du recensement de Quirinius. « Les partisans de cette philosophie suivaient pour tout le reste les principes des Pharisiens, mais avec un amour obstiné de la liberté, ne voulant admettre que Dieu comme chef et comme maître » [3].

Le mot d’ordre excluait aussi bien les Romains que les descendants d’Hérode, aussi Josèphe reconnaît-il là le germe de tous les malheurs de la nation sous Gessius Florus, lors de la révolte générale.

Dans quelle mesure cette sorte de démocratie religieuse excluait-elle un roi vraiment national, un roi Messie ? il n’est pas aisé de le dire. Il est même probable qu’en refusant l’obéissance à toute personne humaine on n’avait guère en vue que des étrangers, puisque ces indépendants indomptables ont toujours eu des chefs, et que plusieurs ont essayé de prendre le titre de rois.

Judas, fils d’Ézéchias, fut un de ces chefs[4] ; il s’empara du palais de Séphoris, et aspira à la royauté. Puis ce fut Simon, esclave d’Hérode, qui prit le diadème et fut salué roi. Puis Athrongès, une sorte de bandit à la Mandrin, osa lui aussi aspirer à la royauté et prit

  1. Ant. XVII, xi, 2.
  2. Ant. XVII, x, 10.
  3. Ant. XVIII, i, 6 : ἧς οἱ τρόφιμοι τὰ μὲν λοιπὰ πάντα γνώμῃ τῶν Θαρισαίων ὁμολογοῦσι, δυσκίνητος δὲ τοὐ ἐλευθέρου ἔρως ἐστὶν αὐτοῖς, μόνον ἡγεμόνα καὶ δεσπότην τὸν Θεὸν ὑπειληφόσι.
  4. Josèphe, très mal informé sur le temps d’Archélaüs auquel il ne consacre que quelques lignes pour un règne de neuf ans, semble avoir confondu l’agitation antérieure et postérieure à son règne. Judas, fils d’Ézéchias, qui s’empare du palais de Séphoris (Ant. XVII, x, 5), doit être le même que Judas le Galiléen, qui poussa à la révolte au temps du recensement de Quirinius (Ant., XVIII, i, 1). Tout s’arrangerait assez bien dans l’hypothèse d’un premier recensement. D’autant que le grand prêtre Joazar est aussi déposé deux fois : une fois au début du règne d’Archélaüs (Ant. XVII, xiii, 1), une fois par Quirinius (Ant. XVIII, ii, 1).