Page:Le proces Zola devant la cour d assises de la Seine et la cour de cassation, Paris Bureaux du Siècle etc , 1898, Tome 1.djvu/121

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Me Labori. — Non, non.

M. le Président. — vous prétendez que, dans l’affaire Dreyfus, il y a illégalité.

Me Labori. — Oui, monsieur le Président.

M. le Président. — C’est donc la même chose. C’est inutile d'insister.

M. Zola. — Mais, monsieur le Président, l’affaire Esterhazy est aussi jugée.

M. le Président. — Mais vous êtes poursuivi pour ce fait-là.

M. Zola. — Mais pour l’autre aussi, nous sommes poursuivis.

M. le Président. — Pas le moins du monde.

M Zola. — Il Y a donc des différences dans la chose jugée ?

M. le Président. — Nous ne discuterons pas, car ce point a été l'objet d'un arrêt de la Cour.

M Zola. — Je ne demande pas mieux de comprendre. Je voudrais savoir, si l’autorité de la chose jugée n'existe pas, pourquoi l’autorité de la chose jugée existe dans mon assignation.

M. le Président. - La Cour est revenue deux fois sur ce sujet et a rendu des arrêts.

Me Labori. — Permettez-moi de vous relire un passage pour lequel nous sommes poursuivis :

M. Emile Zola a accusé le second Conseil de guerre « d’avoir couvert cette illégalité par ordre »

Et qu'est-ce que cette « illégalité » ?

Elle est qualifiée par la première partie de ce même paragraphe :

« J'accuse le premier Conseil de guerre d’avoir violé le droit en condamnant un accusé sur une pièce secrète. »

M. le Président. — La question ne sera pas posée, vous débattez inutilement.

Me Labori. — Inutilement, non ; peut-être inutilement pour obtenir un arrêt favorable, mais pas au point de vue de ma cause car le monde nous juge, et MM. les jurés aussi suivent ces débats avec intérêt. (Mouvements divers.)

M. le Président. — Un peu de silence, je vous en prie.

Me Labori. - Sur ce premier point, comme vous faites remarquer que les discussions sont inutiles, j’aurai l’honneur de déposer des conclusions et j'attendrai un arrêt de la Cour.

Mais je ne veux pas retenir plus longtemps à la barre M. Casimir Périer ; je vous demanderai donc, monsieur le Président, sur le seul terrain de la moralité et de la bonne foi — et j’espère qu’il n’y aura pas besoin d’un arrêt de la Cour pour que satisfaction nous soit donnée ici — de poser à M. Casimir-Périer la question suivante :

Si une pièce secrète avait été produite dans un débat quelconque, devant une juridiction quelconque et si une condamnation avait été obtenue de la sorte, qu'est-ce que M. Casimir-Périer — qui ne se retranchera pas pour me répondre, j'en suis