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Page:Le proces Zola devant la cour d assises de la Seine et la cour de cassation, Paris Bureaux du Siècle etc , 1898, Tome 1.djvu/77

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giment d’infanterie, écrit qu’il est manifeste qu’il ne peut être assigné qu’à raison du rôle qu’il a rempli au Conseil de guerre qui, en décembre 1894, a jugé le capitaine Dreyfus.

Insistez-vous, maître Labori ?

Mes Labori et Clémenceau. — Oui, monsieur le Président.

M. le Président. — M. le général de Boisdeffre écrit qu’il n’a été aucunement mêlé à l’instruction du procès Esterbazy, qui dépendait uniquement du gouverneur militaire de Paris.

Me Labori. — Monsieur le Président, M. Zola s’étonne beaucoup — et je ne puis m’empêcher de communiquer à la Cour et à MM. les jurés cette observation — que tous ces témoins, suivant l’indication fournie à la tribune, non pas seulement par M. le Ministre de la guerre, mais par M. le Président du Conseil lui-même, semblent s’imaginer qu’ils forment une caste à part et indépendante, qu’il leur est permis de s’élever au-dessus de tous les droits, de la justice elle-même, de se faire juges personnellement de la question de savoir s’ils sont utiles ou non comme témoins dans une affaire. Par conséquent, pour M. le général de Boisdeffre, comme pour les autres, nous insistons et nous protestons.

Me Clemenceau. — Nous sommes un peu désorientés, parce que, dans les lettres que vous lisez, monsieur le Président, il y a des témoins qui disent qu’ils ne viendront pas parce qu’ils connaissent certains faits, et d’autres, comme M. de Boisdeffre, qui disent qu’ils ne viendront pas parce qu’ils ne connaissent pas l’affaire du Conseil de guerre. Nous ne savons laquelle de ces deux observations est la bonne, mais il est impossible qu’elles soient bonnes toutes les deux.

Il est intéressant pour MM. les jurés de retenir que des anciens ministres, des témoins qui ne sont pas les premiers venus, MM. Guérin et Trarieux, anciens Gardes des sceaux, M. Poincaré, ancien Ministre des finances, ont répondu à la citation. Ceux-là viennent ; il est bien certain qu’ils n’avaient rien à craindre s’ils avaient écrit à M. le Président qu’ils ne pouvaient pas venir. Donc, ces anciens ministre répondent à notre appel et, parmi les militaires, nous ne pouvons pas avoir un témoin. Je crois qu’il est bon que MM. les jurés retiennent cela.

M. le Président. — Maître Labori, vous déposez vos conclusions ?

Me Labori. — Dans quelques minutes, monsieur le Président. Si vous voulez que nous les déposions demain, nous sommes aux ordres de la Cour.

M. le Président. — Il faut avoir le temps de citer les témoins.

Me Labori. — Etant donnée la tournure que prend le débat, il est bien difficile de prévoir que l’affaire ne se prolonge pas pendant trois jours. Au besoin, la Cour pourrait ordonner la comparution de certains témoins pour mercredi. Si la Cour veut bien nous accorder un quart d’heure de suspension, nous