Page:Le venin des vipères françaises.djvu/196

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Notre confrère n’arriva près de la malade qu’à midi, c’est à dire cinq heures après l’accident, et voici les symptômes qu’il constata.

La veuve Bretagne offrait beaucoup d’agitation et d’anxiété. Elle avait de la difficulté à respirer, des lipothymies et des nausées suivies de vomissements bilieux. Elle était entièrement refroidie et couverte d’une sueur glacée ; ses yeux hagards donnaient à sa physionomie une étrange expression de terreur ; son pouls était fréquent et petit. La malade répétait sans cesse qu’elle allait mourir.

L’examen de la jambe fit reconnaître, à trois centimètres environ au-dessus de la malléole interne, deux piqûres profondes, distantes de quelques millimètres et entourées d’un cercle inflammatoire. Une douleur aiguë s’étendait de ce point à tout le membre et était exagérée par la pression ; la tuméfaction gagnait la hanche ; il y avait gêne très prononcée des mouvements ; la peau de la jambe offrait une teinte jaune verdâtre, plus marquée à la cuisse, où la lividité prenait l’aspect de marbrures.

À sa première visite, M. Patry administra 20 gouttes d’alcali dans une infusion de tilleul, conseilla une potion à l’acétate d’ammoniaque, des infusions aromatiques alcoolisées et de vin chaud. Il fit une incision cruciale sur la blessure, et par la succion directe pratiquée à plusieurs reprises, retira une certaine quantité de sang. Il la lava ensuite avec de l’ammoniaque et prescrivit des frictions aromatiques chaudes et fréquemment renouvelées sur tout le corps. Une compresse imbibée d’eau ammoniacale fut maintenue sur la malléole.

29 juin. — Mêmes symptômes généraux que la veille mais exagérés. L’anxiété est extrême et le refroidissement complet. La veuve Bretagne, dans un état d’anéantissement profond, a un pouls misérable ; l’œdème s’est généralisé ; le membre gauche devenu énorme est couvert de phlyctènes.

M. Patry fait envelopper la partie malade dans des feuilles de lierre chauffées au four et continuer les boissons excitantes autant que le permet l’état de l’estomac.

30 juin. — L’œdème a pris une telle extension que la blessée ne peut plus soulever ses paupières. Elle répond à peine aux questions qu’on lui adresse, tant est grande sa torpeur ; son intelligence, du reste est affaiblie. Son pouls est filiforme et intermittent ; les syncopes se rapprochent ; il y a une prostration générale des