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LE VOL SANS BATTEMENT

C’est au début de l’année 1911 que je me préoccupai de classer ces papiers. Il y avait là environ douze cents feuillets de diverses grandeurs, les uns à peu près en ordre dans des enveloppes jaunes, les autres pêle-mêle, des prospectus imprimés, au dos couvert d’une fine écriture, des photographies d’un appareil d’aviation, enfin de grandes feuilles de papier à dessin, découpées suivant l’ombre d’oiseaux aux ailes étendues, ou portant au crayon de ces silhouettes sur lesquelles Mouillard s’était expliqué déjà longuement dans son livre.

Je lus avidement, au hasard, les premiers feuillets qui me tombèrent sous les yeux. Je croyais trouver là le manuscrit de l’Empire de l’Air. À ma grande surprise il n’en était rien. Sans doute c’était encore une œuvre sur l’observation du vol des oiseaux et son application aux recherches de vol mécanique, mais c’était autre chose que le livre connu. On imagine aisément avec quelle curiosité impatiente je parcourus ces papiers étendus devant moi. Certes, élargie et affinée, semblait-il, je retrouvai toute la profondeur de pensée et l’observation nette qui font l’intérêt et la clarté de l’Empire de l’Air, mais c’est en vain que je cherchai à reconnaître quelque brouillon de ce premier ouvrage dont tant de phrases se trouvent inscrites dans nos mémoires.

Mon émotion fut au comble, lorsque, sur un feuillet détaché de l’ensemble, je lus ce qui suit ;

« Il faut donc voir d’abord, puis voir souvent, si on veut se sentir à chaque instant de force à se mesurer avec les défaillances intellectuelles par la vue de l’évolution.

« Au fait, est-ce bien un bon conseil que je donne là ?