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LE VOL SANS BATTEMENT

les idées reçues, mais qui n’en est pas moins vrai pour cela, c’est que ces nocturnes malgré leurs yeux extraordinaires y voient souvent à peine pour se conduire. Dans la nuit complète, au reste, ils ne volent pas, je m’en suis assuré bien des fois en faisant l’obscurité absolue. Mes chouettes et même mes grands-ducs n’osaient plus s’envoler, et c’était naturel car l’organe de la vision ne crée pas la lumière ; quand il n’y en a pas il ne peut pas la trouver. Un oiseau de nuit dans l’obscurité précise, un chat, même une chauve-souris, être qui possède cette faculté à un degré encore bien supérieur, dans le noir exact n’y voit pas plus que nous.

Cependant j’ai été longtemps à me persuader de ce fait, ma conviction était entravée par un cas étrange qui s’était passé sous mes yeux et que je ne m’explique pas.

Dans ces expériences sur l’action de l’obscurité complète sur les yeux des oiseaux, j’y soumis des chauves-souris vulgaires. À mon grand étonnement elles volaient presque aussi facilement que dans la lumière de la nuit ordinaire. Je repris l’expérience avec plus de soin, produisis le noir le plus exact et créai même une difficulté, c’était le passage d’une chambre à une autre par un gros tuyau de cheminée en tôle de 0,40 centimètres de diamètre et long de plusieurs mètres. Ce tuyau allait aboutir dans un réduit sans ouverture ; l’obscurité y était donc absolue. Je remarquai aux battements des ailes que le vol était fortement gêné, cependant il n’y avait jamais choc contre les murs. Elles ne savaient presque plus s’accrocher au plafond, manquaient souvent leur abordage, mais cependant, à ma grande surprise, elles passèrent toutes, en quelques minutes de tâtonnements, dans le tuyau et de là dans le réduit, afin de fuir la présence de l’homme dont leur