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LE VOL SANS BATTEMENT

sait les rendre heureux. Si, par hasard, on se décidait à oser ces acclimatations de volateurs et qu’on s’offre quelques pélicans, je ne réponds plus de l’ordre. Le pélican ! mais c’est l’anarchie pure ! Il se moquera parfaitement des règlements et des coutumes sociales. S’il a envie de coucher son gros bêta d’individu là plutôt qu’ailleurs, vous ne le déciderez pas facilement à rentrer dans les rangs. On verrait assurément plus d’une fois au Bois de Boulogne le spectacle suivant ; deux ou trois de ces gros palmipèdes barrer une route et ne pas vouloir céder la place même aux grands chevaux et aux bonnets à poils de la Garde Républicaine ; il ne faudrait rien moins que les balais des cantonniers pour débarrasser le chemin. Ils s’en iraient alors l’air furieux, dandinant lentement leur gros train de derrière, et, au fond, enchantés de la farce qu’ils viendraient de faire. J’ai raconté quelques-unes de leurs polissonneries inoffensives, mais vous trouveriez encore à en glaner une belle collection.

Donnez à ces oiseaux de petites îles pour y habiter comme on l’a fait au parc de Lyon, et vous y verrez nicher canards, mouettes, sternes, et tout ce que vous voudrez. Il est défendu aux barques d’y aborder ; ces défenses sont écrites sur des poteaux bien en vue, et le règlement est observé, parce qu’on a eu le bon esprit de les mettre sous la protection de tous. Celui qui, à Genève ou à Lyon, ferait du mal aux oiseaux se mettrait dans un mauvais cas.

Vous auriez alors une récréation amusante bien autrement instructive que celle qu’offrent les cygnes estropiés des bassins, les ramiers des squares, et l’éternel moineau qui n’a rien d’intéressant.

On objectera qu’à l’époque des émigrations tous les oiseaux partiront et seront perdus. Erreur ! à Lyon, les canards sauvages émigrent régulièrement, mais ils se