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LE VOL SANS BATTEMENT

morable expérience est décrite d’une manière précise dans le Vol sans battement.

« J’avais réussi, à force de combinaisons profondes et un déploiement de roueries à n’y pas croire, à être seul dans la ferme. J’avais déjà essayé les effets de mon appareil, sauté de quelques mètres de hauteur, je voyais qu’il portait, mais je n’osais expérimenter devant le public de chez moi, et le temps me durait de mieux voir ce que cet aéroplane était capable de faire.

« J’avais donc envoyé tout mon monde… à la campagne et je me promenais dans la prairie avec mon appareil sur les épaules, courant contre le vent, et étudiant son action de soutènement. Le vent était presque nul, la brise n’était pas encore levée et je l’attendais.

« Près de là se trouvait une route qui s’élevait d’un mètre et demi au dessus de la plaine ; elle avait été ainsi exhaussée par l’apport des fossés de trois mètres de largeur qui la bordaient.

« L’idée me vint de sauter ce fossé.

« Sans mon appareil je le franchissais facilement, je voulus essayer de le faire muni de mon aéroplane, je courus donc sur le travers de la route et je sautai le fossé comme à l’ordinaire. Mais, oh horreur ! arrivé à l’autre bord, mes pieds ne touchèrent pas le sol. Je courais sur l’air, faisant des efforts inutiles pour atterrir : mon aéroplane était fixé. Je n’étais qu’à un pied de terre et je ne pouvais l’atteindre ; et je glissais sans pouvoir m’arrêter. Enfin mes pieds finirent par rencontrer le sol. Je tombai sur les mains, cassai une rémige, et tout fut fini. Mais quelle peur j’avais eue ! Je me disais que si un simple léger coup de vent arrivait, il me lançait à dix ou quinze mètres en l’air, et que là-haut j’étais renversé forcément et que je retombais sur le dos. Je savais cela parfaitement, je connaissais les imperfections de mon appareil et les effets qu’il devait