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CONDILLAC ÉCONOMISTE

actuellement cette valeur intrinsèque ne se vendent pas au marché suivant cette valeur : cela dépend des humeurs et des fantaisies des hommes et de la consommation qu'ils feront.

« Si un seigneur coupe des canaux et élève des terrasses dans son jardin, la valeur intrinsèque en sera proportionnée à la terre et au travail : mais le prix de la vérité ne suivra pas toujours cette proportion : s’il offre de vendre ce jardin, il se peut faire que personne ne voudra lui en donner la moitié de la dépense qu’il a faite et il se peut aussi faire, si plusieurs personnes en ont envie, qu’on lui en donnera le double de la valeur intrinsèque, c’est-à-dire de la valeur du fonds et de la dépense qu’il a faite[1] . »

On sait enfin qu’Adam Smith, au contraire de Condillac. avait émis une théorie de la valeur fondée sur le travail, et qu’il ne considérait que la valeur en échange, souvent confondue avec le prix dans la Richesse des Nations.

De la mesure des valeurs. — Adam Smith proposait comme mesure pratique des valeurs relatives des choses, le blé, à cause des variations de la valeur de l’argent et de l’or.

Si les métaux précieux, dit-il, varient peu de valeur d’une année à l’autre, il n’en est pas de même si l’on considère de grandes périodes : d’un siècle à l’autre on constate des variations considérables. « D’un siècle à l’autre le blé est une meilleure mesure que l’argent, parce que, d’un siècle à l’autre, des quantités égales de blé seront bien plus près de commander la même quantité de travail que ne le seraient des quantités égales d’argent[2]

Le blé, par ce fait qu’il est l’aliment fondamental, a toujours

  1. Cantillon, op. cit., 1 ère partie, chap. x. p.36-37.
  2. Adam Smith, op. cit., édition citée, t. 1, liv. I, chap. v, p. 131.