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II


C’était la défaite, la ruine irrémédiable de tous ses projets. Lupin ne l’accepta pas.

— Un mot, sire, je vous en supplie ; une simple question, si vous le permettez… Après quoi…

— Dites.

— Combien de temps Herlock Sholmès a-t-il mis pour arriver à ce même résultat ?

— Trois jours.

— Et moi, quelques heures, sire. Et j’aurais mis encore moins si je n’avais été contrarié dans mes recherches.

— Et par qui, mon Dieu ? Par mon fidèle comte ? J’espère bien qu’il n’aura pas osé.

— Non, sire, mais par le plus terrible et le plus puissant de mes ennemis, par cet être infernal qui a tué M. Kesselbach, qui a tué son complice Altenheim.

— Il est là ? Vous croyez ? s’écria l’empereur avec une agitation qui montrait qu’aucun détail de cette dramatique histoire ne lui était étranger.

— Il est partout où je suis. Il me menace de sa haine constante. C’est lui qui m’a deviné sous M. Lenormand, chef de la Sûreté, c’est lui qui m’a fait jeter en prison, c’est encore lui qui me poursuit, le jour où j’en sors. Hier, pensant m’atteindre dans l’automobile, il blessait le comte de Waldemar.

— Mais, qui vous assure, qui vous dit qu’il soit à Veldenz ?

— Isilda a reçu deux pièces d’or, sire ; qui les lui aurait données ?

L’empereur haussa les épaules.

— Les pièces d’or ? mais c’est Herlock Sholmès ; j’étais là.

— Pardon, sire, Sholmès arrivait d’Angleterre. L’or qu’il portait ne pouvant être qu’anglais ou allemand. Les deux pièces d’aujourd’hui sont des louis de France.

L’argument frappa l’empereur. Il dit :

— Que viendrait-il faire ? Dans quel but ?

— Je ne sais pas, sire, mais c’est l’esprit même du mal. Que Votre Majesté se méfie. Il est capable de tout.