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L’ILLUSTRATION THÉÂTRALE


Scène VIII

LUPIN, SONIA

Lupin. — Ah ! voir la gueule de Guerchard !… Oui, faites du boucan, là-haut… l’immeuble est à moi… ça n’attire personne !… Ah ! sapristi ! qu’est-ce que j’ai fait de ma bombe ?… (Il rentre dans l’ascenseur, prend la bombe et, l’élevant au bout de son bras.) Tragédiante ! (Il laisse tomber la bombe qui rebondit. Il la met sur la table.) Comédiante !… Ah ! maintenant… bien que j’aie cinq bonnes minutes… célérité ! (Il se précipite vers la porte de l’antichambre et regarde par la serrure.) Un agent et Victoire… Pauvre Victoire !… (Il pousse le verrou, puis il va à droite et entend du bruit.) Hein !… des agents !… il en pousse donc !

Il reprend la bombe et élève le bras. Parait Sonia.

Sonia. — Ah ! mon Dieu !… Monsieur Guerchard !

Lupin, vivement. — Non, c’est moi.

Sonia. — Vous ! oh !

Lupin. — Regardez comme je lui ressemble ! Hein ? Suis-je assez moche ?

Sonia. — Oh !

Lupin. — Cette fois, le duc de Charmerace est mort.

Sonia. — Non, mon ami, c’est Lupin.

Lupin. — Lupin ?

Sonia. — Oui, ça vaut mieux.

Lupin. — Ce serait une perte, vous savez.. une perte pour la France !

Sonia. — Non.

Lupin. — Faut-il que je vous aime !…

Sonia. — Vous ne volerez plus ?

Lupin. — Est-ce que j’y pense encore. Vous êtes là… Guerchard est dans l’ascenseur… Je ne désire plus rien… Toi là, j’ai l’âme d’un amoureux, et c’est encore l’âme d’un voleur, j’ai envie de voler tes baisers, tes pensées, de voler tout ton cœur. Ah ! Sonia, si tu ne veux pas que je vole autre chose, il n’y a qu’à plus me quitter…

Sonia. — Tu ne voleras plus… (Ils s’embrassent.) Du bruit !

Lupin, se précipite vers la cage de l’ascenseur. — Non. Ce n’est rien. C’est Guerchard qui tape du pied.

Sonia. — Comment ?

Lupin. — Je t’expliquerai… c’est rigolo. Ah ! je suis heureux… non… je ne volerai plus… je… Tiens… (Tirant un objet de sa poche.) le chronomètre à Guerchard. Je le lui ai pris. C’est pratique. Tu le veux ?

Sonia, avec reproche. — Déjà !…

Lupin. — Oui, c’est vrai… pardon, mais comme c’est difficile ! On le lui laisse, n’est-ce pas ?

Sonia. — Dépêche-toi… il faut nous sauver…

Lupin. — Nous sauver ! jamais ! chut ! (Il ouvre la porte.) Agent ?

L’Agent. — Patron.

Lupin, changeant de voix et tournant le dos à l’agent. — Agent !… Lupin est dans l’ascenseur, arrêté par Boursin : il va descendre.

L’Agent. — Lupin ?

Lupin. — Oui, et ne vous laissez pas rouler par ses déguisements. Il ne peut y avoir dans l’ascenseur que Boursin et Lupin. Guettez-le et sautez dessus.

L’Agent. — Bien, patron.

Lupin. — Et vous porterez cette bombe au laboratoire municipal. (Il fait jouer le bouton de l’ascenseur. Puis entraînant Sonia et Victoire chacune par une main) Allons, vous deux, au Dépôt. Et vous pouvez considérer qu’Arsène Lupin est mort… mais c’est l’amour qui l’a tué.

Ils disparaissent. Guerchard descend de l’ascenseur et se précipite à la suite de Lupin.

L’Agent, braquant son revolver. — Halte ! ou je fais feu !

Guerchard. — Hein ?

L’Agent. — Ah ! vous vous faites la tête du patron…

Guerchard se dégage et court vers la porte.

Boursin. — Idiot ! crétin ! mais c’est celui-ci le patron, l’autre c’était Lupin.

L’Agent. — Quoi ?

Guerchard. — Fermée ! trop tard ! Hein ? Il entend la corne d’une automobile. Guerchard s’élance à la fenêtre. Avec un grand cri.) Et il fout le camp dans mon automobile !…

rideau

Scène VII. Lupin : « Vous connaissez ça, les enfants ?… Une bombe ! »