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Page:Leblanc - Arsène Lupin gentleman-cambrioleur.djvu/99

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GENTLEMAN-CAMBRIOLEUR

Après une heure de ce manège, il semblait harassé de fatigue. De fait, avisant un banc, il s’assit. L’endroit, situé non loin d’Auteuil, au bord d’un petit lac caché parmi les arbres, était absolument désert. Une demi-heure s’écoula. Impatienté, Ganimard résolut d’entrer en conversation.

Il s’approcha donc et prit place aux côtés de Baudru. Il alluma une cigarette, traça des ronds sur le sable du bout de sa canne, et dit :

— Il ne fait pas chaud.

Un silence. Et soudain, dans ce silence un éclat de rire retentit, mais un rire joyeux, heureux, le rire d’un enfant pris de fou rire, et qui ne peut pas s’empêcher de rire. Nettement, réellement, Ganimard sentit ses cheveux se hérisser sur le cuir soulevé de son crâne. Ce rire, ce rire infernal qu’il connaissait si bien !…

D’un geste brusque, il saisit l’homme par les parements de sa veste et le regarda profondément, violemment, mieux encore qu’il ne l’avait regardé aux Assises, et en vérité ce ne fut plus l’homme qu’il vit. C’était l’homme, mais c’était en même temps l’autre, le vrai.

Aidé par une volonté complice, il retrouvait la vie ardente des yeux, il complétait le masque amaigri, il apercevait la chair réelle sous l’épiderme abîmé, la bouche réelle à travers le rictus qui la déformait. Et c’étaient les yeux de