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Page:Leblanc - De minuit à sept heures, paru dans Le Journal, 1931.djvu/29

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Oui, elle comprenait. L’expédition pleine de fatigues et de dangers, c’était pour elle qu’il l’avait faite… et il comptait qu’elle en serait le prix. Il ne disait pas : « Je vous remets votre fille et votre collier contre le don de vous-même », mais c’était cela qui se trouvait sous la douceur enjouée de ses paroles. Et ce regard sur elle, qui investissait sa volonté, que ses yeux à présent ne pouvaient plus fuir, où elle lisait un désir ardent, ce regard, sans qu’elle en eût bien conscience, la troublait. Elle n’avait plus de force. L’angoisse de ne pas revoir sa fille, la joie de la retrouver, avaient brisé sa résistance nerveuse.

Gérard devina sa pensée, prit place auprès d’elle et lui saisit les mains.

— Natacha, vous vous méprenez sur moi. Si je vous ai rendu votre enfant, je vous rends les perles sans qu’il y ait là, de ma part, la moindre condition. Je suis incapable de calcul. Repoussez-moi, si vous voulez, mais ne craignez rien. Vous êtes libre.

Disait-il vrai ? Et voulait-elle accepter cette liberté qu’il n’offrait peut-être que parce qu’elle ne pouvait plus la reprendre ? Elle ne savait pas. Elle n’avait plus de force. Elle s’abandonna…

La comtesse Valine partit au matin, emportant ses perles, emportant le souvenir de cet homme dont elle ne savait rien et qu’elle ne reverrait jamais…



V

Trois portraits… deux rivaux


Le lendemain de son arrivée à la villa d’Ivan Baratof, Gérard passa la majeure partie de la journée à dor-