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un amour

dans leur conversation ni dans leurs regards n’indiquait qu’ils eussent été jamais plus que des camarades loyaux et dévoués. Quand il la quitta, il n’avait même pas osé baiser sa main.

Il ne manquait pas à sa promesse, et quotidiennement il arrivait vers quatre heures. Souvent M. Terrisse le trouvait encore là et l’invitait à dîner, s’étant toujours amusé de ce caractère ondoyant, qui contrastait avec sa propre nature, posée et travailleuse. Un peu dérouté par la disparition subite du jeune homme, il avait applaudi à son retour. Cela lui permettait de s’échapper à la fin du repas, sans s’inquiéter de sa femme.

Durant ces longues entrevues, la souffrance de Jacques devenait intolérable. Il ne pouvait s’habituer à l’affabilité banale de Marthe.

— Je vous en prie, disait-il, soyez méchante, acariâtre, agressive, tout plutôt que cet accueil cordial qui me glace.

Il tentait bien de soulager sa blessure en songeant que Marthe avait été sienne, mais cette évocation élargissait plutôt la plaie de son âme. Tandis qu’elle parlait, il parcourait son corps ; il en savait tous les détails exquis ; ses lèvres,