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un amour

Les minutes s’enchaînèrent, lentes et angoissantes. Ils n’osaient parler. Des choses douces, l’haleine d’un soir d’été, un parfum d’héliotrope, des odeurs lointaines de foin coupé, la clarté blanche de la lune, leur parvenaient avec une netteté surnaturelle, et leurs idées flottantes et indécises avaient peine à percer l’amoncellement des impressions du dehors. Puis un bruit de sanglots troubla le silence. Marthe pleurait, envahie d’une peur mystérieuse, ayant l’intuition d’un danger formidable.

Au bout d’une heure, M. Terrisse la fit prier de le rejoindre. Elle obéit, et de suite, en entrant chez lui, elle comprit sa vengeance. Des malles encombraient la chambre, les tiroirs étaient vides, la bonne enveloppait de vêtements le petit Georges. Elle trembla, et, le regard anxieux, demanda :

— Vous partez ?

— Nous parlons, répondit-il, en désignant l’enfant du doigt.

Il renvoya la bonne, puis, s’apercevant que Marthe chancelait, il l’assit lui-même avec précaution, et il poursuivit, penché sur elle :

— Je ne vous en veux pas à vous, je vous