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le fils aux duramé

Victor, vaguement inquiet, hésita. Mais Césarine répondit :

— Oui, m’sieu, c’est nous, les Duramé.

Aussitôt l’inconnu s’approcha d’elle et déposa sur ses genoux un tas de langes.

— Défaites vite, dit-il en souriant, c’est un enfant, un garçon comme le vôtre, ça vous en fera deux, la mère, si vous y consentez.

Elle ne bougeait pas, interdite. Cependant, comme il insistait, elle écarta les langes. Un être apparut, un morceau d’être qui se mit à crier, réveillé par le froid. Alors, d’un geste machinal, elle l’attira contre sa poitrine, à la place inoccupée, et l’enfant s’abreuva goulûment à la source de vie.

L’homme prononça d’une voix triste :

— Vous voyez, il s’habitue déjà. Il oublie sa maman.

Il resta quelques secondes à regarder ce spectacle, les yeux humides. Puis, secouant sa torpeur, il s’expliqua rapidement, à phrases courtes et nettes :

— Soyons brefs, je n’ai que peu de temps. J’ai su que vous étiez pauvres, jeunes, bien portants, travailleurs. C’est pourquoi je m’adresse