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II


Par-dessus la haie du jardin, Marc aperçut son père. La pipe à la bouche, coiffé d’un panama, vêtu d’un tricot et d’un pantalon de toile, chaussé de sabots, M. Hélienne émondait ses arbustes à l’aide d’un sécateur.

Le jeune homme s’attarda quelques minutes à le considérer. Il l’enviait. Cette besogne lui semblait saine. Les mauvaises pensées ne prévalent pas contre la satisfaction du labeur accompli et l’orgueil des courbatures fécondes. Il s’applaudit de sa fuite hors de la ville corruptrice où l’idée monstrueuse avait germé. Une existence paisible le sauverait de la tentation.

Il ouvrit la petite porte en bois. Une sonnette retentit. Marc s’avança.

— Bonjour, père.

Le vieux leva la tête, parut hésiter un moment et prononça sans surprise ni humeur :

— Ah ! c’est toi, mon garçon.

Ils ne s’étaient pas vus depuis dix ans.

M. Hélienne, bijoutier à Paris, se