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rieuses ? En voici une par exemple qui dénote des aptitudes incontestables. Et nul ne s’en soucie, pas même sa mère, cette grosse dame qu’effarait notre intimité.

Il s’en soucierait, lui. Toute plante vaut qu’on la cultive, et celle-là n’aspirait qu’à éclore et à s’épanouir en fleurs vivaces.

Il la revit souvent au théâtre ou au bal. Ces rendez-vous se donnaient franchement, sans affectation de complicité équivoque.

— Je vais chez les ***, la semaine prochaine, annonçait la jeune fille, je vous y ferai inviter.

Et Marc y allait.

Afin que son œuvre d’amélioration fût fondée sur des bases parfaites, il interrogeait beaucoup Louise. Quels goûts la dominaient ? Quels rêves ? Quels raisonnements ? Chaque fois, Louise réfléchissait, signe de sagacité, et chaque fois Marc, coupant court à cette hésitation peut-être douloureuse, répondait à la demande lui-même, selon les indices de caractère qu’il possédait. Louise ravie, comme si l’on eût énoncé en phrases claires les idées un peu vagues que son manque d’habitude l’empêchait d’exprimer, déclarait à tout instant :

— C’est ça, absolument ça. Combien vous devinez juste !

Il se forma ainsi une opinion compacte que rien ne pouvait entamer, puisqu’il se chargeait d’apporter lui-même les nouveaux matériaux. D’après cette opinion, il dirigea la culture intellectuelle de sa jeune amie, élaguant les rameaux inutiles, régénérant la sève de cet esprit avec l’appoint généreux de son expérience et de ses révoltes.

Pourquoi se donnait-il toute cette