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péties dans le secret de son cerveau. Elle l’eût certes écouté fort tranquillement, sans songer qu’un acte commis par celui qu’elle aimait pût être répréhensible. D’ailleurs, il la devinait affranchie des préjugés.

Il cherchait une entrée en matière, lorsque Bertrande cueillit à côté d’elle une marguerite et la porta vers sa bouche. Machinalement elle se mit à mordiller la fleur.

Marc épia son manège. Les lèvres s’entr’ouvraient, saisissaient un pétale et jouaient avec lui, le roulant et le mouillant, de salive. Alors le désir de Marc brisa les digues fragiles qui le maintenaient et se rua sur la bouche tentante.

Se sentant observée. Bertrande tourna son visage souriant. Et elle le vit.

Elle eut une expression de lassitude extrême. Découragé par sa défaite, Hélienne n’essaya pas de se disculper, et ils se regardèrent avec des yeux tristes et plaintifs. Elle lui pardonnait son désir et il ne lui en voulait pas de sa sévérité. Le mal était en dehors d’eux, dans l’inflexible loi qui domine la chair. Il murmura :

— Ce n’est pas ma faute, ce n’est pas ma faute.

Il s’attendait à ce qu’elle le consolât. Mais comme elle ne disait rien il pensa qu’il valait mieux se quitter de nouveau, et il fit quelques pas au bord de la rivière, vers l’issue par où elle se glisse. Bertrande cria :

— Marc ! Marc !

Il accourut. Elle ne bougeait pas, la figure impénétrable. L’avait-elle réellement appelé ?

Il la contempla longuement sans qu’elle parût s’en aviser. Une des man-