fut pas dupe de mon calme apparent, mais je devais souvent remarquer ce trait de son caractère, qu’elle ne semble jamais s’apercevoir de vos petitesses. Coupant court à une hésitation qui tenait beaucoup plus à la crainte de me chagriner qu’à l’ennui de répondre, elle me dit :
— C’est le frère de mon amie Catherine, tu sais, la fille du nouvel instituteur, avec laquelle je me promenais cet été. Il nous accompagnait toutes les fois. Nous nous sommes entendus tout de suite.
— Que fait-il ?
— Il veut être professeur. En attendant, il remplace son père qui est malade.
— Et il t’aime ?
— Oui.
— Et toi, tu l’aimes ?
— Moi aussi,
— Mais pourquoi vous rencontrez-vous en dehors de sa sœur ?
— Catherine est une enfant de quatorze ans et son frère est gêné devant elle, c’est moi qui lui ai demandé de venir.
— Et si d’autres personnes vous surprenaient ?
— Tant pis, je n’ai que ce moyen pour savoir à quoi m’en tenir sur lui.
Quel mélange bizarre d’imprudence et de réflexion ! J’étais déconcerté. Elle affirmait sen amour avec ferveur et, en même temps, il y avait de l’ironie dans la lucidité qu’elle gardait à l’endroit de ce jeune homme.