« — Puis-je vous demander un service, monsieur ?
« Elle est oppressée. Elle a dû courir. Et tout de suite, sans attendre la réponse, elle ajoute :
« — La personne que vous avez rencontrée désirerait avoir un entretien avec vous.
« L’inconnue s’exprime aisément en français. Pas le moindre accent.
« Mon père hésite. Mais cette hésitation semble la révolter, comme une offense inconcevable envers la personne qui l’envoie, et elle dit d’un ton plus âpre :
« — Je ne suppose pas que vous avez l’intention de refuser !
« — Pourquoi pas ? dit mon père, dont je devine l’impatience. Je ne reçois aucun ordre.
« — Ce n’est pas un ordre, dit-elle en se contenant, c’est un désir.
« — Soit, j’accepte l’entretien. Je reste ici à la disposition de cette personne.
« Elle parut indignée.
« — Mais non, mais non, il faut que ce soit vous…
« — Il faut que ce soit moi qui me dérange, s’écria mon père fortement, et sans doute que je franchisse la frontière au delà de laquelle on daigne m’attendre ! Tous mes regrets, madame, c’est là une démarche que je ne ferai pas. Vous direz à cette personne que, si elle redoute de ma part une indiscrétion, elle peut être tranquille. Allons, Paul, tu viens ?
« Il ôta son chapeau et s’inclina devant l’inconnue. Mais elle lui barra le passage.
« — Non, non, vous m’écouterez. Une promesse de discrétion, est-ce que cela compte ?