« Il sera libre… vous le verrez… mais il ne faudra pas l’effrayer… il y a des choses qu’il ignore… »
Elle s’aperçut qu’il écoutait non pas les paroles prononcées, mais la voix qui les prononçait, et que cette voix devait le plonger dans une sorte d’extase, car il se taisait et souriait. Alors elle sourit aussi et l’interrogea, l’obligeant ainsi à répondre.
« Vous avez tout de suite dit mon nom. Vous me connaissiez, n’est-ce pas ? Moi-même il me semble qu’autrefois… Oui, vous me rappelez une de mes amies qui est morte…
— Madeleine Ferrand ?
— Oui, Madeleine Ferrand.
— Je vous rappelle aussi peut-être le frère de cette amie, un collégien timide qui venait souvent au parloir et qui vous contemplait de loin…
— Oui, oui, affirma-t-elle… En effet, je me souviens… Nous avons même causé plusieurs fois… Vous rougissiez… Oui, oui, c’est cela… vous vous appeliez Stéphane… Mais ce nom de Maroux ?…
— Madeleine et moi, nous n’étions pas du même père.
— Ah ! dit-elle, voilà ce qui m’a trompée. »
Elle lui tendit la main.
« Eh bien, Stéphane, puisque nous sommes de vieux amis, et que la connaissance est faite de nouveau, nous remettrons tous nos souvenirs à plus tard. Pour l’instant il n’y a rien de plus pressé que de partir. Vous en avez la force ?
— La force, oui, je n’ai pas trop souffert… Mais comment s’en aller d’ici ?
— Par le même chemin que j’ai pris pour y venir… Une échelle qui communique avec le couloir supérieur des cellules… » Il s’était levé.
« Vous avez eu le courage ?… la témérité ?… » dit-il, se rendant compte enfin de ce qu’elle avait osé faire.
« Oh ! ce n’était pas bien difficile, déclara-t-elle. François était si inquiet ! Il prétend que vous occupez tous les deux d’anciennes chambres de torture… des chambres de mort… »