Page:Leblanc - L’Île aux trente cercueils.djvu/215

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noc avait chipée, celle qui l’a brûlé, et qui l’a forcé à se couper la main. »

Vorski se tut. Il était désorienté. Il ne savait plus quel parti prendre et quelle conduite tenir à l’égard de ce singulier adversaire.

Le vieux Druide se rapprocha de lui, et, doucement, d’un air paternel :

« Non, vois-tu, mon petit, tu n’en sortiras pas sans moi. Moi seul ai la clef de la serrure et le mot du coffre. Pourquoi hésites-tu ?

— Je ne vous connais pas.

— Enfant ! Si je te proposais quelque chose d’indélicat et qui soit incompatible avec ton honneur, je comprendrais tes scrupules. Mais mon offre est de celles qui ne sauraient froisser la conscience la plus chatouilleuse. Hein ? ça colle ? Non ? Pas encore ? Mais, par Teutatès, qu’est-ce qu’il te faut, incrédule Vorski ? Un miracle, peut-être ? Seigneur, pourquoi ne l’as-tu pas dit plus tôt ? Mais des miracles, j’en ponds treize à la douzaine. Tous les matins, en prenant mon café au lait, j’accomplis mon petit miracle. Pense donc, un Druide ! Des miracles ? mais j’en ai plein ma boutique. Je ne sais plus où m’asseoir. Qu’est-ce que tu préfères ? Rayon de résurrection ? Rayon des cheveux qui repoussent ? de l’avenir dévoilé ? Tu n’as que l’embarras du choix. Tiens, à quelle heure ta trentième victime a-t-elle exhalé son dernier soupir ?

— Est-ce que je sais !

— Onze heures cinquante-deux. Ton émotion fut si forte que ta montre en a été arrêtée. Regarde. »

C’était absurde. Le choc produit par l’émotion n’a aucun effet sur la montre de celui qui a subi cette émotion. Cependant, malgré lui, Vorski tira sa montre : elle marquait onze heures cinquante-deux. Il essaya de la remonter, elle était cassée.

Le vieux Druide, sans lui laisser le temps de reprendre haleine, continua :

« Ça t’épate, hein ? Rien de plus simple, cependant, et de plus facile pour un Druide un peu à la hauteur. Un Druide voit l’invisible. Bien plus, il le fait voir à qui