Page:Leblanc - L’Île aux trente cercueils.djvu/230

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Est-ce qu’un homme qui se défie, ou qui tout au moins sait qu’un danger peut l’atteindre, s’offre ainsi aux coups de l’ennemi ? Et pourquoi, — le regard de Vorski perçait peu à peu les demi-ténèbres de l’arrière crypte, — pourquoi la tunique blanche était-elle maculée de taches qui paraissaient rouges… qui étaient rouges, aucun doute n’était possible. Pourquoi ?

Otto dit à voix basse :

« Il a une drôle de pose. »

Vorski avait la même pensée, et il précisa :

« Oui, une pose de cadavre.

— Une pose de cadavre, approuva Otto. Le mot est exact. »

Après un instant, Vorski recula d’un pas.

« Oh ! fit-il, est-ce croyable ?

— Quoi ? demanda l’autre.

— Entre les deux épaules… regarde…

— Eh bien ?

— Le couteau…

— Quel couteau ?

— Celui de Conrad, affirma Vorski… Le poignard de Conrad… je le reconnais… planté droit entre les deux épaules. »

Et il ajouta en frissonnant :

« Les taches rouges viennent de là… c’est du sang… du sang qui coule de cette blessure.

— En ce cas, observa Otto, il est mort ?

— Il est mort… oui, le vieux Druide est mort… Conrad l’aura surpris, et il l’a tué… Le vieux Druide est mort ! »

Vorski resta indécis un assez long moment, prêt à se jeter sur le corps inerte et à le frapper à son tour. Mais il n’osait pas plus le toucher mort que vivant, et tout ce qu’il eut le courage de faire, ce fut de se précipiter et d’arracher l’arme hors de la plaie.

« Ah ! bandit, s’écria-t-il, tu as ce que tu mérites, et Conrad est un rude type. Conrad, sois sûr que je ne t’oublierai pas.

— Où peut-il être, Conrad ?

— Dans la salle de la Pierre-Dieu. Ah ! Otto, j’ai