Page:Leblanc - L’Île aux trente cercueils.djvu/255

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nuit des temps, fut enlevée par des mauvais génies qui doit être ramenée un jour par le fils d’un roi. Les paysans vous montrent encore le vide que laissa cette pierre au flanc d’une colline.

« C’est toi, le fils de roi, lui disait sa mère. Et si tu retrouves la pierre dérobée, tu échapperas au poignard qui te menace, et toi-même tu seras roi. »

« Cette prédiction saugrenue et une autre, non moins baroque, par laquelle la Bohémienne annonçait que l’épouse de son fils périrait sur la croix et que lui-même mourrait de la main d’un ami, furent de celles qui influèrent le plus directement sur Vorski lorsque sonna l’heure fatidique. Et j’en arrive tout de suite à cette heure fatidique, sans parler davantage de ce que nous ont révélé tous les trois nos conversations d’hier et de cette nuit et de ce que nous avons pu reconstituer. À quoi bon, en effet, reprendre en détail le récit que vous avez fait à Véronique d’Hergemont, Stéphane, dans votre cellule ? À quoi bon vous mettre au courant, vous Patrice, toi Vorski, et toi Tout-Va-Bien, d’événements connus de vous, comme ton mariage, Vorski, — ou plutôt tes deux mariages, avec Elfride d’abord, puis avec Véronique d’Hergemont, — comme l’enlèvement de François par son grand-père, comme la disparition de Véronique, comme les recherches que tu fis pour la retrouver, comme ta conduite au moment de la guerre et ton existence dans les camps de concentration ? Simples broutilles à côté des événements qui vont se produire. Nous avons élucidé l’histoire de la Pierre-Dieu. C’est l’aventure moderne, entrelacée par toi, Vorski, autour de la Pierre-Dieu, que nous allons débrouiller.

« Au début, elle se présente ainsi. Vorski est enfermé dans un camp de concentration situé près de Pontivy, en pleine Bretagne. Il ne s’appelle plus Vorski, mais Lauterbach. Quinze mois plus tôt, après une première évasion, et au moment où le conseil de guerre allait le condamner à mort pour espionnage, il s’est échappé, a vécu dans la forêt de Fontainebleau, a retrouvé un de ses anciens domestiques, nommé Lauterbach, Allemand comme lui et comme lui fugitif, l’a tué, lui a passé ses