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LES DOUZE AFRICAINES DE BÉCHOUX

— Je te le donne en mille.

— Parle, cré nom d’un chien !

— Le portefeuille de l’ancien ministre ! »

Béchoux sauta de son siège.

« Hein ? Que dis-tu, Barnett ? Tu accuses le député Touffémont ?

— Tu es fou ! Est-ce que je me permettrais d’accuser un député ? A priori, un député, ancien ministre, est insoupçonnable. Et parmi tous les députés et tous les anciens ministres — et Dieu sait si ça pullule ! — je considère Touffémont comme le plus insoupçonnable. N’empêche qu’il servit de receleur à Mme Alain.

— Complice, en ce cas ? Le député Touffémont serait complice ?

— Pas davantage.

— Alors, qui accuses-tu ?

— Qui j’accuse ?

— Oui.

— Son portefeuille. »

Et posément, gaiement, Barnett expliqua :

« Le portefeuille d’un ministre, Béchoux, est un personnage considérable. Il y a, de par le monde, M. Touffémont, et il y a son portefeuille. L’un ne va pas sans l’autre, et chacun est la raison d’être de l’autre. Tu n’imagines pas M. Touffémont sans son portefeuille, mais tu n’imagines pas non plus le portefeuille de M. Touffémont sans M. Touffémont. Ils ne se séparent jamais l’un de l’autre. Seulement il arrive que M. Touffémont pose quelquefois son portefeuille à côté de lui, pour manger, par exemple, ou pour dormir, ou pour accomplir tel geste de la vie courante. Dans ces moments-là, le porte-